Tranquillement, je pense aux invités que j’aimerais recevoir pour la prochaine saison du podcast «Autour du piano blanc»… Mais d’ici là, j’ai envie de faire une rétrospective de la première saison. Qu’en dites-vous ? Je suis tellement reconnaissante pour la qualité et la générosité des artistes reçus au cours de cette première expérience. Un beau projet qui n’aurait pas vu le jour sans pandémie mais qui, je le crois bien, continuera de grandir. Voici donc aujourd’hui, une transcription de mon entretien avec l’artiste Laura Gagné. J’ai eu envie de prendre le temps d’en faire un article, sachant que pour certains, cette formule reste plus accessible.
Bonne lecture !
V: Ma première invitée sur le podcast est nul autre que Laura Gagné. C’est une artiste que j’adore, elle est devenue une amie avec le temps et aujourd’hui je lui parle en direct d’où déjà Laura ?
L : Du New-Hampshire !!
V: Alors bonjour Laura ! Comment ça va ?
L : Ça va bien, ça va bien. Beaucoup de changements, beaucoup de choses qui se passent mais on garde le cap, on garde le moral et je suis quand même gâtée donc je dois dire que ça va bien !
V: Tu sais, j’ai créé ce podcast dans le but de voir la musique de l’intérieur, c’est un peu le fil conducteur de chaque épisode. Je recherche donc des artistes qui ont une belle spiritualité et une espèce de lumière qui émane d’eux. Évidement, ton nom est arrivé en premier dans ma tête ! Quelle merveilleuse âme pour illuminer ce fil audio ! J’aimerais donc pour commencer l’entrevue, que tu nous parle de ta démarche artistique si authentique et singulière. Pourquoi faire de la musique et comment dans ton cas ?
L: C’est une grosse question ça ! Haha. Tu sais, je ne faisais pas vraiment de musique avant l’âge de 16-17 ans. J’étais à fond dans les sciences. Par contre, je viens d’une famille qui en fait de la musique et pour moi, ça représente vraiment l’aspect familial et communautaire : communauté – amour – partage.
À l’âge de 17 ans, j’ai fait un concours de musique, pour le plaisir et j’ai découvert un talent. Je pense que c’était dans mes veines. Les gens m’écoutaient d’une façon tellement incroyable ! On entendait une mouche voler. Ça a été pour moi un gros «start». Ça m’a bouleversé d’avoir autant d’écoute et l’écoute est associé à l’amour pour un artiste. Quand tu es écouté et apprécié de cette façon là, c’est tellement d’amour. Pas d’une façon égoïste, puisque c’est un partage qui est énorme. Quand tu chantes sur scène, tu donnes tout, tu es à nu devant les gens. Ils te redonnent tellement ensuite que la vague d’amour est incroyable. C’est tout l’aspect associé à l’amour qui m’a transporté dans l’univers de la musique.
J’ai deux albums : le premier est Bonbon pour l’âme, le deuxième est Arriver jusqu’à toi. Ils racontent des évènements personnels qui sont arrivés. Tout est centré sur cette quête de l’amour inconditionnel, de l’amour plus grand que soi. C’est comme si je cherche à partager l’amour et à le vivre en tout temps. C’est le plus beau sentiment humain à mes yeux. Je veux le vivre toute ma vie. Je veux toujours être dans l’amour.
La musique rassemble, comme l’aspect familial des partys de famille où on chantait. Ça rassemble des gens autour de moi, ça me permet de m’exprimer, de partager et d’écouter les autres qui s’ouvrent à moi. Une fois que j’ai chanté, souvent les gens viennent me parler et me raconter leurs histoires qui sont parfois similaires à ce que j’ai vécu. Donc la musique a beaucoup d’impact. C’est aussi ce qui m’a amené à faire ça comme carrière. Ça a tant de valeurs à mes yeux. C’est «Fulfillment», désolée ça fait deux semaines que je parle en anglais ! Ça me remplit.
V: Parlant d’anglais, tu écris en anglais et en français, tu as d’ailleurs sorti ton premier extrait en anglais ces dernières semaines et il est plein d’amour. Tu peux nous en parler ?
L: Oui ! Loveland, c’est le pays de l’amour finalement ! C’est l’amour qui rend libre, qui nous affranchit. C’est le paradis d’amour qu’on recherche tous, je pense. La chanson présente bien les relations humaines, amicales, amoureuses ou spirituelles. Si on croit en Dieu ou peu importe en qui on croit au delà de nous, il y a un partage qui remplit.
V: I love you friend, est aussi une chanson que tu viens de sortir, n’est-ce pas ?
L: Oui ! I love you friend est sortie vendredi dernier. Elle parle d’une relation amoureuse que j’ai vécue avec mon meilleur ami. C’était compliqué parce que quand ça tourne à l’amour, tu ne sais plus si c’est ton ami ou vraiment ton amoureux. Veux tu passer ta vie avec lui ? Ça a tourné en cercle pendant longtemps. Assez longtemps pour se blesser. J’ai vécu cette histoire et je pense que plusieurs l’ont vécue aussi. I love you friend dépeint vraiment ce portrait et le fait que malgré les difficultés, il y avait quand même l’amour et le pardon dans cette histoire là.
V: D’accepter la relation telle qu’elle est, qui évolue et qui doit continuer d’évoluer…
L: Oui, vraiment. Les gens aiment cette chanson parce qu’elle est authentique. Plusieurs vivent ça ou l’ont vécu. Je le raconte de manière simple et c’est facile de tout saisir.
V: C’est ce que j’aime dans ce que tu fais. Ces temps-cis, il y a beaucoup de lourdeur, surtout avec la pandémie. Tu dois sentir que ta musique fais du bien ? On a besoin de cette légèreté…
L: Ça arrive dans un bon moment mais en même temps, un drôle de moment. Loveland a sorti le 13 mars. Le jour des annonces de confinement ! Je trouvais tellement que le timming n’avait pas rapport ! C’est quoi les chances ! Au début j’étais vraiment triste. Finalement, ça n’a peut-être pas eu l’impact que j’aurais cru au niveau de l’industrie musicale, mais au niveau des gens qui l’ont écoutée, ça a eu un impact positif incroyable. Le timming était finalement parfait.
I love you friend est sorti la journée où le grand débat sur le racisme est arrivé. On se demandait si on reportait la sortie mais c’était trop compliqué. Il y a eu un gros trou dans l’industrie ces jours là, mais au final, la chanson s’est faufilée dans plein de playlists et était super écoutée. C’est une chanson sur le pardon et l’amour donc drôle de timming en effet, mais bon ! Je l’ai accepté comme ça et je me dis qu’il n’y a peut-être pas de hasards.
V: En même temps, c’est ce qui est beau. Un espèce de chaos plane sur tout plein de projets en ce moment, on parle de culture parce que c’est notre domaine, mais c’est comme ça dans plein d’industries. Il y a énormément de questionnements. Est-ce qu’on se lance quand même ? Est-ce qu’on fait ça ou ça ? Dois-je concentrer mes énergies ailleurs ? Et là, c’est comme s’il y a une force qui nous anime et qui fait en sorte qu’on a jamais le goût de lâcher ! Est-ce que tu pense qu’on ne peut pas lâcher, ou c’est une décision qu’on prend à tout les jours ? Parfois je me pose la question…
L: C’est une bonne question ! Parce que je n’ai jamais réussi à lâcher et je me suis posée la question des centaines de fois. Minimum une fois par mois ! Ça va peut-être avec mon cycle hormonal ! Une fois par mois, je suis assise sur mon divan et je me demande ce que je vais faire. J’aime plein de choses, les projets ne sont pas ce qui manque et pas juste en musique. Je pourrais ouvrir un café demain, je pourrais écrire un livre, j’ai tellement d’idées. Je suis une créatrice. Je pourrais faire mille et une autres choses. Mais j’ai l’impression que la musique me ramène toujours à moi. La musique nous tient au plus profond de notre âme.
V: Je dis souvent à mes élèves qui me regardent en disant qu’ils veulent faire carrière dans ce métier que ce n’est pas vraiment eux qui choisissent la musique. La musique nous choisis.
L: Tu as raison je pense…
V: Nous sommes des êtres tellement émotifs. Pour créer, il faut avoir cette sensibilité là, cette émotion à fleur de peau qui nous plane toujours dessus…
L : Oui, et c’est un cercle vicieux parce que tu te dis bon, j’en ai marre, je suis tannée de la musique, je n’ai pas ce que je veux, je suis triste ou je me compare tsé… Et comme tu dis, on arrive au bout et à fleur de peau et c’est à ce moment là qu’on crée et que quelque chose de magique sort.
Tout ça nous ramène constamment là et j’ai l’impression que c’est un espèce d’appel, comme tu le dis. C’est la musique qui nous choisis. Certains vont dire qu’ils veulent être musiciens ou artistes, ils ont leurs propres raisons et c’est correct. Sauf que peut-être que leur raison c’est d’être populaires… et si ce n’est pas d’être authentique ou ça ne vient pas du plus profond d’eux mêmes, je ne pense pas qu’ils vont persévérer. Et justement, est-ce qu’on est vraiment si persévérants que ça ? Ma mère et tout le monde autour de moi me disent Laura, t’es tellement persévérante. Et je ne sais pas si je suis persévérante. C’est peut-être juste les cycles qui reviennent. Une chanson sort, j’obéis à ce qui se passe dans ma créativité, je recommence.
V: Je trouve ça le fun ce que tu dis et c’est vraiment pour ça que j’avais envie de parler de ça dans le podcast. Je savais que ça me ferait du bien de t’écouter parler. On a parfois l’impression de ne pas être persévérants. On est comme fous ou démunis ! Haha, à vouloir à tout prix arriver à nos fins.
L: Haha, c’est bon ça ! Ça m’arrive souvent de me sentir naïve. Parfois, ça passe dans le beurre, mais parfois je fais des choses totalement naïves et ça fonctionne. J’en parle souvent, mais j’ai rencontré Yves Duteil à l’aéroport et j’ai fait une chanson avec lui et à la base c’était tellement naïf.
V: Racontes donc cette histoire là ! Je la connais, mais peut-être que les gens ne la connaissent pas…
L: En fait, j’avais composé une chanson «De la lune à ton balcon» et j’avais dis à mes parents que j’allais la chanter avec Yves Duteil. J’ai grandit avec lui dans la maison puisque mes parents l’aimaient beaucoup. J’avais dit ça de façon naïve, mais j’y croyais quand même. Je me disais : je vais réussir, mais je ne sais pas quand. Je me disais que quand je serais «populaire», je pourrais lui demander. C’était un peu ça dans ma tête et finalement, j’allais prendre l’avion lorsque soudainement mon éditeur Jehan Valiquet m’appelle et me dis : savais-tu qu’Yves Duteil prend l’avion en même temps que toi ? Je lui répond que non et finalement, quand je suis arrivée à l’aéroport il était là. Je lui ai dit bonjour et lui ai fait écouter mes chansons. Il a écouté 4 maquettes et je lui ai demandé de chanter avec moi. Ça aussi c’était naïf, de lui donner des maquettes de même ! Il m’a dit «De la lune à ton balcon» je la trouve parfaite. Je ne lui avais pas dit que c’est elle que je voulais faire. Mais naïvement, je lui réponds «voulez-vous l’enregistrer avec moi ?». Il m’a dit «oui, viens à mes studios avec mes musiciens». Je n’en revenais pas ! Le timing a été parfait. On a fait la chanson avec les musiciens et on a tourné un vidéoclip.
Quand on dit que la musique nous appelle, justement là, il n’y avait rien à forcer. Il faut juste avoir la foi.
V: As-tu l’impression que l’humanité manque de naïveté ?
L: Oui, parce qu’on aime souvent contrôler les choses. Je n’ai rien contre les gens qui veulent planifier les choses parce qu’ils se sentent plus en sécurité dans un cadre mais moi, le cadre me fait mourir. Je n’aime pas la routine et ça laisse place à une sorte d’écoute de soi et à la naïveté de demander pour voir si ça marche ou pas. Si ça ne marche pas, c’est pas plus grave que ça ! Beaucoup de gens ont peur de l’échec et je pense qu’il faut se lancer, même dans des choses qui n’ont pas de sens. On est toujours gagnants car au final, même quand c’est difficile on apprend. Donc oui, ça prend de la naïveté et on en a pas beaucoup dans le monde en général. J’ai l’impression qu’en tant qu’artistes on est tellement hypersensibles qu’on arrive à croire a la spontanéité et à la magie qui peut opérer.
V: À un moment donné, c’est comme si tout était lié. À un point, je me demande maintenant si le terme naïf est bon. J’aime beaucoup ta manière d’évoquer la foi. Le fait de croire en quelque chose. On ne sait pas si au final ça va arriver ou pas, mais juste d’y croire, ça fait du bien. À un moment donné, c’est ce qui provoque justement des rencontres ou des moments privilégiés en spectacles par exemple.
L : Je crois beaucoup en la providence. Je ne sais pas à quel point quand tu crois en quelque chose ça arrive vraiment. Parfois, j’ai rêver et cru en des choses qui ne sont jamais arrivés. Genre devenir millionnaire demain…
V: De nos jours, on parle beaucoup de la loi de l’attraction ou de la visualisation. Tu disais tantôt «j’ai jamais su si ça allait arriver, mais je le voyais dans mes rêves»… Es-tu quelqu’un qui a ces pratiques ou tu le vis vraiment spirituellement que ce soit par les prières ou le recueillement ? Comment vis-tu tes aspirations ou tes désirs d’aller plus loin ?
L: Je crois vraiment en la connaissance de Dieu. C’est paradoxal parce que plus je me rapproche d’un Dieu vivant, il a eu plusieurs noms dont plusieurs salis aussi… Mais l’être suprême, au dessus de nous est l’Amour. L’amour est en nous mais vient d’une source infinie.
V: Est-ce cette source qui t’a amené à croire et à focaliser ta carrière sur le partage de cet amour suprême comme tu l’appelles ?
L: Oui, ça m’a motivé parce que depuis l’enfance j’ai cette connaissance d’un Dieu qui existe. Ce n’est pas nécessairement parce que d’autres m’ont dit d’y croire. Ça n’a pas rapport. Ça vient vraiment du coeur et j’étais ouverte spirituellement. Le fait de vivre cet amour inconditionnel en dehors des relations humaines est exceptionnel. Ça me prouve que tout le monde a droit à l’amour et que l’amour existe et qu’il est accessible à tous. Peu importe d’où tu viens, qui tu es et qu’est-ce que tu as fait. Ça on dirait que peu de gens l’ont compris. Beaucoup de gens vont se punir, ou diront qu’ils ne méritent pas l’amour, ou le cherchent mais ne le trouvent pas. Ce n’est pas un mérite, c’est rien, ça existe, point. C’est accessible et fais juste y croire !
Parfois, je chante «De la lune à ton balcon» et je vois des messieurs se mettre à pleurer, à éclater en sanglots. Ça arrive souvent. J’ai la sensibilité de partager cet amour là, plus grand que nous, et ça touche tout le monde, même les coeurs les plus durs.
V: Ce coeur qui est souvent enterré. Il a des couches. On se cache, on ose pas vivre. On entend d’ailleurs souvent des jeunes entrepreneurs qui ont un produit auquel ils croient, mais n’osent pas se lancer. Quand j’écoute tes chansons, j’ai l’impression qu’on enlève nos couches ! Les préjugés s’envolent et tu nous parle de profondeur. Ta spiritualité pour moi, n’est pas en surface. Elle n’est pas moralisatrice. Et au fond, c’est commun à toutes les religions de juste propager l’amour. Je trouve ça intéressant d’en avoir parlé sous différents aspects avec toi aujourd’hui.
L : Ça me fait penser que pour se laisser être aimer, ou découvrir cet amour là, ou enlever les couches ou même pour un entrepreneur de foncer avec son produit, ça prend de l’humilité. C’est spécial à dire, mais ça prend de l’humilité pour accepter qu’on ne s’auto-suffit pas. C’est un long cheminement.
V: Accepter que tout n’ira pas toujours où on le souhaite.
Laura, je pourrais continuer encore longtemps comme ça ! Je trouve ça intéressant le podcast parce qu’on se croise souvent, sur des spectacles, etc et on a pas toujours le temps de parler de ces choses là.
L: Haha non ! Entre le test de son et la grande discussion !
V : Exact, ça passe toujours trop vite. Mais là, je veux vraiment inviter les gens à écouter tes albums et la profondeur de tes textes. Installez-vous confortablement et laissez vous transporter. Rien n’est compliqué dans ta musique mais c’est tellement efficace ! On peut te suivre sur Patreon et participer à la création de ton 3e album, ou sur Instagram, Facebook, youtube, apple music, etc. Il y a aussi le www.lauragagne.com
Merci infiniment pour ce bel échange. De t’entendre, met plein de lumière dans ma journée
L: Merci de m’avoir invitée ! C’est vraiment une belle idée et je souhaite longue vie à ce podcast avec différents artistes !
V: On se quitte sur I love you friend…
L: Bonne écoute !